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Session de formation sur la Convention pour la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) et son mécanisme de suivi GREVIO 13 octobre 2025

ASSEDEL a eu le plaisir d’accueillir Marie-Claude Hofner, médecin de profession, qui est la première femme médecin à siéger au groupe de suivi de la Convention d’Istanbul au Conseil de l’Europe — le Groupe d’experts sur l’action contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO). La session de formation a abordé la question majeure de la violence à l’égard des femmes, exacerbée par une structure sociale patriarcale. La violence envers les femmes est un problème multiforme que l’on peut comparer à un iceberg : la partie visible représente les cas les plus extrêmes et violents de féminicide et de dommages physiques, mais elle englobe également des formes plus subtiles de violence, comme les blagues sexistes.


Le membre de GREVIO a suggéré que la violence à l’égard des femmes ne devrait pas être considérée uniquement comme une question juridique ou politique, mais comme un problème public d’importance majeure. Pour qu’un phénomène soit considéré comme un problème public, il doit répondre aux critères suivants : 1) être fréquent ; 2) avoir des conséquences graves pour la santé ; 3) avoir un impact négatif sur la société ; et 4) être évitable. Un examen approfondi de la violence envers les femmes montre qu’il s’agit bien d’une question d’intérêt public :


La fréquence de la violence envers les femmes est très élevée : 30,7 % des femmes dans l’UE subissent des violences physiques, sexuelles ou des menaces au cours de leur vie. Cela signifie qu’une femme sur trois vivra une situation de violence.


Les conséquences de la violence envers les femmes sur la santé sont graves. L’impact sur la santé physique et mentale est significatif. Par exemple, les femmes ayant subi des violences ou vivant dans un environnement violent sont plus susceptibles de souffrir de dépression, de pensées suicidaires et de dépendances. Elles présentent également un risque accru de développer des maladies chroniques, en particulier des maladies cardiovasculaires.


L’impact sur la communauté est considérable. Une situation de violence a des répercussions tant sur les individus que sur la société dans son ensemble. Par exemple, dans 70 % des cas, les enfants sont directement exposés à la violence, devenant souvent eux-mêmes victimes. De même, 40 à 60 % des auteurs ont été exposés à la violence durant leur enfance, ce qui normalise les comportements violents et entraîne un cercle vicieux de violence. De plus, l’impact financier de la violence sur la société est important, avec des répercussions sur le secteur de la santé, des coûts sociaux et un effet négatif sur la main-d’œuvre.


La prévention est possible puisque la violence est un comportement, et les comportements peuvent être modifiés en apprenant des interactions non violentes. Dans ce contexte, des politiques publiques sont nécessaires pour lutter contre les inégalités entre les femmes et les hommes. Des mesures de prévention, telles que la détection précoce des victimes, l’éducation des enfants et des jeunes, ainsi que la protection des victimes, ont été évaluées et ont montré leur efficacité.


Dans ce contexte, la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, également connue sous le nom de « Convention d’Istanbul » (CI), a été adoptée le 1er août 2014. Elle constitue la norme de référence en matière de législation sur la violence basée sur le genre et vise à protéger toutes les femmes, y compris celles ayant des besoins spécifiques, contre toutes les formes de violence, y compris la violence domestique, à contribuer à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité. Tous les États membres du Conseil de l’Europe, à l’exception de l’Azerbaïdjan, ont signé la CI, et elle est ouverte à l’adhésion par tous les États dans le monde. Pour mieux comprendre la Convention, il est essentiel de clarifier certains concepts. La violence à l’égard des femmes constitue une violation des droits humains fondée sur le genre. Elle est liée aux inégalités entre les femmes et les hommes dans la société, entraînant des discriminations envers les femmes. Elle trouve son origine dans un déséquilibre historique du pouvoir entre les femmes et les hommes, l’inégalité entre les sexes étant la cause sous-jacente.

En se basant sur le concept de genre en tant que rôles, comportements, activités et attributs socialement construits qu’une société considère appropriés pour les femmes et les hommes, la violence fondée sur le genre se définit comme une forme de violence dirigée contre une femme parce qu’elle est une femme ou qui affecte les femmes de manière disproportionnée. Dans ce contexte, Marie-Claude Hofner souligne le rôle du patriarcat dans la perpétuation et la facilitation de la violence envers les femmes. Vivre dans une société patriarcale n’entraîne pas automatiquement de violence au niveau individuel, mais révèle un problème structurel.


Pour lutter contre cette situation, la Convention repose sur une stratégie basée sur quatre piliers, appelée approche des 4P. Le premier pilier concerne la prévention, prevention par le biais de campagnes de sensibilisation et de programmes éducatifs visant à changer les attitudes et les lois, ainsi qu’à déconstruire les rôles de genre qui rendent la violence envers les femmes socialement acceptable. Deuxièmement, le pilier de la protection se concentre sur le rôle de l’État dans la protection des femmes contre la violence et la création d’un environnement sûr. Troisièmement, le pilier de la poursuite judiciaire met l’accent sur la nécessité d’établir des législations, de mener de bonnes enquêtes et d’effectuer des évaluations systématiques des risques pour lutter contre la violence envers les femmes. Il est particulièrement impératif de veiller à ce que les auteurs soient tenus responsables de leurs actes. Enfin, le pilier des politiques intégrées englobe un large éventail de réponses. Cela signifie que la violence envers les femmes ne peut être combattue uniquement par l’action policière, l’éducation, les campagnes médiatiques ou les mesures économiques. Tous les secteurs doivent travailler ensemble de manière coordonnée pour réussir.


La Convention repose sur un système de suivi à deux piliers, composé d’un groupe de 15 experts indépendants. Ces experts réalisent des évaluations approfondies et rédigent des rapports sur les pays (GREVIO). Ces rapports sont ensuite soumis au Comité des Parties du Conseil de l’Europe pour examen.

Enfin, il convient de noter que la violence à l’égard des femmes ne concerne pas uniquement les femmes et les filles ; elle affecte également les hommes et les garçons, qui doivent jouer un rôle central dans la solution. Le succès ne pourra être atteint que par leur participation active.


Session de formation sur tla Convention d’Istanbul et le travail de GREVIO


Le 3 octobre 2025, ASSEDEL a eu le plaisir d’accueillir le Dr Marie-Claude Hofner, médecin et membre du Groupe d’experts sur l’action contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) — l’organe indépendant de suivi de la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, largement connue sous le nom de Convention d’Istanbul.

La session a offert à l’équipe d’ASSEDEL une opportunité unique d’explorer en profondeur le fonctionnement de GREVIO et le contexte plus large de la Convention d’Istanbul — un traité international pionnier qui reste la référence en matière de protection des femmes et des filles contre la violence.


Violence à l’égard des femmes : une réalité persistante et complexe


Le Dr Hofner a commencé par rappeler que la violence envers les femmes demeure l’une des violations des droits humains les plus répandues et persistantes en Europe et au-delà. Elle a illustré la complexité de ce phénomène par l’image d’un iceberg : la pointe visible représente les formes de violence les plus extrêmes et publiques — telles que les agressions physiques ou les féminicides — tandis que la partie invisible, beaucoup plus large, représente les innombrables formes cachées de violence : manipulation psychologique, violences verbales, contrôle économique et même les remarques sexistes quotidiennes.

Cette analogie rappelle que la lutte contre la violence doit aller bien au-delà du traitement des symptômes visibles — elle doit s’attaquer aux causes structurelles et culturelles de l’inégalité entre les sexes.


De la sphère privée à la préoccupation publique


Le Dr Hofner a souligné que la violence envers les femmes ne doit pas être considérée comme un problème privé ou individuel, mais comme un enjeu public nécessitant une responsabilité collective et l’action de l’État.

Pour qu’un phénomène social soit reconnu comme un problème public, il doit répondre à plusieurs critères : il doit être fréquent, avoir des conséquences graves pour la santé, affecter négativement la société dans son ensemble et être évitable. Toutes ces conditions s’appliquent à la violence basée sur le genre :

Fréquence : Les études montrent qu’une femme sur trois (30,7 %) dans l’Union européenne subit des violences physiques ou sexuelles, ou des menaces, au cours de sa vie.
Impact sur la santé : Les conséquences sur la santé physique et mentale sont graves. Les victimes sont beaucoup plus susceptibles de souffrir de dépression, de pensées suicidaires, de dépendances et de maladies chroniques telles que les maladies cardiovasculaires.
Conséquences sociales : Environ 70 % des enfants vivant dans des foyers où la violence se produit y sont directement exposés, et 40 à 60 % des auteurs ont eux-mêmes été victimes pendant leur enfance, perpétuant ainsi un cercle vicieux de violence.
Prévention : Comme la violence est un comportement appris, elle peut être désapprise. Des mesures telles que la détection précoce des victimes, l’éducation des enfants et des jeunes, la sensibilisation et la protection des victimes doivent être mises en œuvre. Toutes ces mesures de prévention ont été évaluées et se sont avérées efficaces.

Le Dr Hofner a insisté sur le fait que la violence fondée sur le genre a des effets qui dépassent le niveau individuel — elle affecte les familles, les communautés et l’ensemble de la société. Son impact économique est également considérable, générant d’énormes coûts pour les systèmes de santé et une perte de productivité.


La Convention d’Istanbul : la référence en matière de protection


Adoptée par le Conseil de l’Europe en 2011 et entrée en vigueur en 2014, la Convention est ouverte non seulement aux 46 États membres du Conseil de l’Europe (tous sauf l’Azerbaïdjan l’ont signée), mais aussi aux pays non européens, démontrant sa valeur universelle.

Elle protège toutes les femmes — y compris celles appartenant à des groupes vulnérables tels que les migrantes, les réfugiées ou les femmes en situation de handicap — et reconnaît que la violence à l’égard des femmes est à la fois une forme de discrimination et une violation des droits humains.

La Convention d’Istanbul repose sur les « 4P », une approche globale intégrant plusieurs dimensions d’action :

Prévention — Les États doivent s’attaquer aux causes profondes de la violence en promouvant l’égalité des sexes, en déconstruisant les rôles de genre et en organisant des campagnes de sensibilisation et des programmes éducatifs.

Protection — La stratégie met l’accent sur le rôle de l’État dans la protection des femmes contre la violence et la création d’un environnement sûr.

Poursuite judiciaire — L’accent doit être mis sur l’établissement de législations, la qualité des enquêtes et l’évaluation systématique des risques afin de lutter contre la violence envers les femmes. Il est particulièrement impératif de s’assurer que les auteurs soient tenus responsables.

Politiques intégrées — Les États doivent coordonner les politiques dans tous les secteurs — justice, santé, éducation et forces de l’ordre — pour garantir une réponse cohérente et efficace.

GREVIO : le suivi de la mise en œuvre de la Convention
Le Groupe d’experts sur l’action contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) est chargé de surveiller la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul dans chaque État partie. Il est composé de 15 experts indépendants élus pour leur compétence et leur intégrité. Le travail de GREVIO repose sur deux mécanismes principaux :
Rapports d’évaluation par pays : ils évaluent la mise en œuvre des dispositions de la Convention dans la législation et la pratique, à partir de questionnaires détaillés adressés aux gouvernements, de visites sur le terrain et des informations fournies par les ONG.
Évaluations thématiques et recommandations : elles visent à renforcer les politiques publiques et à améliorer la coordination entre les institutions.


Une responsabilité globale et collective
Le Dr Hofner a rappelé aux participants que la lutte contre la violence n’incombe pas uniquement aux femmes — les hommes et les garçons doivent également faire partie de la solution. Changer les mentalités, remettre en question les stéréotypes de genre et promouvoir des relations respectueuses nécessite la participation de toute la société.

Elle a conclu en soulignant l’importance de l’éducation et de la sensibilisation dès le plus jeune âge, pour prévenir la violence avant qu’elle ne survienne. Traiter les racines de l’inégalité et garantir un engagement politique cohérent à long terme restent essentiels pour un changement durable.


Engagement d’ASSEDEL
En organisant cette session de formation, ASSEDEL a réaffirmé son engagement en faveur des droits humains et de l’égalité des genres. À travers ses activités éducatives, ses analyses juridiques et son plaidoyer, l’organisation continue de promouvoir une culture de respect, de justice et de dignité pour tous.

L’échange avec le Dr Hofner a enrichi la compréhension de l’équipe d’ASSEDEL sur les mécanismes de la Convention d’Istanbul et sur les défis pratiques auxquels GREVIO est confronté pour assurer la mise en œuvre effective des droits des femmes en Europe.

ASSEDEL remercie chaleureusement le Dr Marie-Claude Hofner pour sa disponibilité et le partage de son expertise, qui a largement contribué à renforcer les connaissances et la motivation de sa jeune équipe à Strasbourg.

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